Crimée. Mythologique 2(b)

22/04/2024

Notez qu'Euripide écrivit en fait cette seconde partie en premier, en 414 avant JC... Et qu'il faudrait donc, en plus de ses nombreuses innovations qui ont profondément influencé le théatre, lui reconnaître, avec l'écriture d'Iphigénie à Aulis, l'invention de la "préquelle" (*), en 406 avant JC.

Mythologique 2b. Iphigénie en Tauride

Iphigénie deuxième partie, donc... Où la tragédie tourne au bain de sang... Il fallait s'y attendre.
Ayant découvert le pot aux roses (**), et ne pouvant pardonner à son époux d'avoir accepté de livrer leur fille en sacrifice (ignorant donc que celle-ci était saine et sauve en Tauride), Clytemnestre et son amant Égisthe assassinent Agamemnon et sa concubine Cassandre qui l'accompagne, à son retour de Troie. Oserais-je un, certes anachronique, "O tempora o mores" !
Oreste, avec l'aide de sa soeur Electre (tous deux autres fils et fille d'Agamemnon et Clytemnestre, et donc frère et soeur d'Iphigénie), se réfugie chez son oncle le roi Strophios, chez lequel il se lie d'une amitié indéfectible avec son cousin Pylade. (Vous suivez ?)
Devenu adulte, il retourne chez lui venger la mort de son père, soit à l'instigation de l'oracle de Delphe (d'après Eschyle), soit à l'instigation de sa soeur Electre (d'après Sophocle), cette dernière version ayant inspiré à Carl Gustav Jung le concept de "complexe d'Electre", équivallent féminin du "complexe d'Oedipe", concept évidemment rejeté par Freud... Bon... Je ne vous dirai pas ce que je pense de ces deux là... Toujours est-il qu'Oreste passa par le fil de l'épée Clytemnestre et Égisthe. Et de quatre !

Poursuivi par les Érinyes (°), suite à ce matricide, jusqu'à en perdre quasi la raison, Oreste consulte l'oracle d'Apollon (encore) qui lui dit qu'il sera pardonné s'il ramène sa soeur de Tauride.
Il s'embarque donc, accompagné de son ami Pylade et de quelques hommes sûrs, pour la Tauride dans le but de s'emparer de la statue d'or de l'Artémis Taurique - Artémis étant soeur d'Apollon. Et c'est ainsi que par une nuit d'orage sur les côtes de Crimée, alors qu'ils cherchent le moyen de s'approcher du temple, les deux amis sont fait prisonniers, et conduits devant Iphigénie pour être sacrifiés.

Ayant compris qu'ils étaient grecs, celle-ci découvre par ses questions qu'un des deux doit être son frère. Elle voudrait le délivrer et faire immoler seulement l'autre. S'en suit un concours de bravoure entre Oreste et Pylade, l'un et l'autre essayant de se sacrifier et de sauver l'ami, pour chacun plus précieux que sa propre vie. Ce combat de générosité excite l'admiration de l'assistance et fait diversion, dont Iphigénie profite pour dégager les deux amis de leurs chaines. Aussitôt, ils appellent leurs compagnons, attaquent les tauriens qu'ils mettent en déroute, emmènent tout à fois la statue d'or d'Artémis et Iphigénie, accomplissant ainsi doublement l'oracle... et reprennent le large ! 

Tout est donc bien qui fini bien, sauf pour le roi Thoas qui périt dans la bagarre... Pour ce qui est des tauriens, selon la légende, l'attitude d'Oreste et Pylade leur fit une telle impression qu'ils oublièrent bientôt l'insulte faite à la déesse et élevèrent un nouveau temple, appelé Orestéon, dédié à l'amitié, vertu première entre toutes...


*   *   *


Illustration : "Pylades et Oreste amenés comme victimes avant Iphigénie" de Benjamin West.

(*) Préquelle: horrible néologisme, par transposition de l'anglais "prequel". Désigne une suite dont l'histoire précède celle d'une oeuvre antérieurement créée (très à la mode dans le cinéma d'aujourd'hui). Le terme officiel (publié au Journal officiel de la République Française) est "présuite". Nos amis du Québec, qui eux ne manquent ni d'idées, ni d'éloquence, ni d'élégance (tout ce qui manque à l'académie française d'aujourd'hui) dans l'invention de leurs néologismes parlent d'antépisode... La classe !

(**) Voir Crimée.Mythologique 2(a)

(°) Érinyes: divinités persécutrices qui obsèdent et tourmentent les coupables de crimes familiaux.




Autres Notes interculturelles...

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